20 Avril 2020
Bonjour chers frères et sœurs, paroissiens de Colomiers.
Nous poursuivons aujourd'hui notre partage sur le texte de Luc 24, 13-35 : Les disciples d'Emmaüs.
Comme prévu, les différents lieux évoqués dans ce texte, retiendront notre attention pour notre réflexion.
Nous relisons donc tout le texte calmement, en repérant tout verset faisant allusion à un lieu.
Personnellement, je retiens 5 (cinq ) lieux: Jérusalem ; Emmaüs ; la Route ; Plus loin ( Jésus fit semblant d'aller plus loin) ; A table (Quand il fut à table avec eux ).
1. Jérusalem.
Dès le premier verset de notre texte (verset 13), il y a une allusion faite à la ville de Jérusalem: la grande ville du temple de Dieu, des pèlerinages, des cultes...la capitale religieuse du royaume de Juda, où vient de se passer la mort de Jésus de Nazareth. On suppose que les deux disciples étaient venus dans cette ville, pour suivre Jésus en qui ils avaient mis tout leur espoir de salut de leur peuple. Mais malheureusement, les choses ne se passent pas comme prévu : Jésus est condamné à mort et crucifié sous les yeux des deux disciples, avec tout leur espoir. Nous comprenons donc, qu'ils quittent Jérusalem en direction d'un village, sans doute le leur, appelé Emmaüs. Les deux disciples quittent Jérusalem ; ils lui tournent le dos. Ils n'y ont plus rien à faire, à espérer. Je ne peux m'empêcher de penser ici, à toutes celles et tous ceux qui n'ont plus rien à espérer de leur familles ; de leurs amis ; de leurs voisins; de leurs collaborateurs ; de leurs collègues ; de leur travail ; de la vie tout simplement.
Mais à la fin du texte, au verset 33, les deux disciples retournent à Jérusalem, après avoir reconnu Jésus, à la fraction du pain, pour témoigner de sa résurrection auprès des Apôtres et de leurs compagnons. Et si là, leur espoir renaissait ? Partis de Jérusalem désespérés, ils retournent à Jérusalem remplis d'espérance. On pourrait donc dire: « De Jérusalem à Jérusalem, en passant par Emmaüs...l'Histoire de la Renaissance d'une Espérance ».
2. Emmaüs.
Apparemment, c'est le village des deux disciples. Il est situé à deux heures de marche de Jérusalem. C'est de ce village que sont partis ces deux compagnons, il y a déjà quelques temps. Ils nourrissaient l'espoir secret de voir Jésus délivrer leur peuple, le peuple d'Israël. Ils espéraient être délivrés de la domination romaine. Ce projet légitime de vie, de liberté et de libération, les avait obligé à tout abandonner ( activités, familles, amis, ...), pour s'en aller à Jérusalem, seulement à quelques kilomètres. Ainsi, ils avaient tourné le dos à leur propre village, pour un salut à la fois individuel et collectif. A deux heures de marche environ, ils espéraient une véritable vie de salut.
Aujourd'hui encore, ils sont des milliers et des milliers de compagnons qui quittent leurs villes et villages, leurs pays, leurs continents, non pas à deux heures de marche seulement, mais à des heures et des heures; des jours et des jours de voyage à pied, en voiture, en bateau, en avion...pour ces Nouvelles Cités de rêves, de vie et de liberté. « Nos Emmaüs » d'aujourd'hui ainsi quittés, sont de plus en plus nombreux sur tous les continents, pour une vie de liberté, une vie meilleure dans nos « Jérusalem d'aujourd'hui ».
Des milliers d'hommes et de femmes, de jeunes et d'enfants prennent donc les routes d'espoir ou de désespoir, mais la fin de chacune de ces histoires nous dira ce qui s'est passé, se passe et se passera sur la route.
3. La Route.
Je suis très touché par le nombre de versets qui parlent de la route et y font allusion dans ce texte. Dès le verset 13: " deux disciples faisaient route (ou se rendaient à un village du nom d'Emmaüs) vers un village appelé Emmaüs. Puis, il y a le verset 15 : « ... Jésus lui-même les rejoignit et fit route avec eux. » Au verset 17, ils marchent mais ils s'arrêtent aussi : « ... Alors ils s'arrêtèrent l'air sombre (tout tristes) ». Le verset 28 révèle qu'ils arrivent bientôt au bout de la route : « Quand ils approchèrent du village où ils se rendaient... » Quant au verset 32, en nous plongeant dans le souvenir des deux disciples, nous ramène à ce qui s'était passé sur le chemin ou la route : « Notre cœur n'était-il pas brûlant en nous, tandis qu'il nous parlait sur la route... » Enfin, le verset 33 remet les deux disciples en route vers Jérusalem: « A l'instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem... »
Oui, beaucoup d'allusions à la route dans ce texte. Mais surtout il s'y passe une rencontre, une vraie. Il s'y passe un dialogue, un vrai. Il s'y passe un cheminement, un vrai. Il s'y passe une amitié, une vraie. Il s'y passe un accueil, un vrai. Il s'y passe un partage, un vrai. Il s'y passe de la tristesse, une vrai. Il s' passe un questionnement, un vrai. Il s'y passe de la joie, une vraie...
Je pense à la route, à la traversée du désert du peuple de Dieu en formation dans le livre de l'Exode; je pense au cheminement de tous les peuples pour leur quête de liberté, de justice et de paix; je pense aux cheminements vers le baptême, la communion, la confirmation, le mariage, le sacerdoce; Je n'oublie pas les recherches de pardon et de réconciliation...Sur quelle route suis-je aujourd'hui? Quelle route prendra notre monde après le corona covid-19?
Pourrons-nous aller loin avec le ressuscité ?
4. Plus loin.
C'est le verset 28 de notre texte qui m'oblige à marquer un arrêt sur cette idée, qui pour moi, indique une topographie, au premier niveau mais aussi une stratégie de la part de Jésus. C'est une attitude surprenante de Jésus qui fait semblant d'aller plus loin:" Quand ils approchèrent du village où ils se rendaient, Jésus fit semblant d'aller plus loin". Il y a comme un arrêt à l'entrée du village d'Emmaüs. Jésus qui a fait la route avec les deux disciples voudrait que leurs chemins se séparent là. Veut-il continuer sa route tout seul, plus loin dans un autre lieu, un autre village? J'imagine qu'ils se disent au revoir et merci pour le bout de chemin fait ensemble. J'imagine qu'ils s'arrêtent pour cette formule de politesse à l'entrée du village ou de la maison des disciples d'Emmaüs. C'est ainsi que les deux compagnons font une demande à Jésus: « Reste avec nous, car le soir approche et déjà le jour baisse. »
C'est une attitude curieuse de Jésus, mais je voudrais essayer de faire un rapprochement avec le texte de la guérison d'un aveugle à Jéricho, qui se trouve en Luc 18, 35-43. Ce texte n'est pas propre à Luc. On le trouve également en Mt 20, 29-34 et en Marc 10, 46-52. Mais un petit détail distingue Luc de Matthieu et de Marc: le lieu où Jésus redonne la vue à l'aveugle de Jéricho.
Pour Matthieu et Marc, c'est à la sortie de la ville. Alors que pour Luc, c'est à l'entrée de la ville de Jéricho, ce qui ressemble un peu à notre verset 28 : « Quand ils approchèrent du village où ils se rendaient... » et voici Luc 18, 35 : " Or, comme il approchait de Jéricho..."
En effet, chez les premiers lecteurs de l'Evangile de Luc, l'arrêt de Jésus aux portes de la ville évoque les coutumes des rois grecs qui visitent leur pays et s'arrêtent aux portes des villes pour écouter les doléances de leurs sujets et leur rendre justice. A Jéricho Jésus exauce la demande de l'aveugle à l'entrée de la ville; A Emmaüs, Jésus exauce la demande des disciples, à l'entrée du village: "Reste avec nous, car le soir approche et déjà le jour baisse. "
Pour moi, il nous faut aller plus loin avec Jésus, aux portes de nos cœurs, pour lui demander d'exaucer les désirs profonds de ceux-ci.
Mon frère et ma sœur, quelle est la demande de ton cœur, au cœur de Jésus ? La demande des disciples d'Emmaüs était que Jésus reste avec eux et partage leur table, leur repas.
5. A table.
C'est clairement la table de l'accueil ; la table pour se refaire des forces; la table des retrouvailles; la table des nouvelles échangées. C'est la table du repas partagé. La table de la réconciliation. La table qui nourrit. C'est la table de la bénédiction et de l'action de grâce. Ce sont toutes nos tables chez nous, mais surtout, ce sont tous les bons repas préparés avec soin et Amour, partagés en famille et avec des amis, des voisins et même avec des étrangers, des démunis, des passants.
C'est aussi l'autel de l'église où se célèbre l'Eucharistie avec le Pain sans levain et la coupe de vin. C'est la grande prière de l'Eglise où se retrouvent tous les enfants de Dieu venus de partout écouter la Parole de Dieu, la vie de Jésus le Christ et s'en nourrir. C'est l'autel où le Christ ressuscité se donne en nourriture et se fait reconnaître à chacun de ses amis qui l'accueillent en esprit et en vérité. Une table où le repas ouvre les yeux et les cœurs, pour vraiment reconnaître et accueillir le Christ Ressuscité et Vivant. Une table d'où on sort pour prendre les routes et donner son témoignage personnel d'un ami qui est toujours avec nous. Il espère faire du monde entier, une grande famille où tout est Joie, Paix et Amour...
A qui s'adresse ce message ? Le texte des disciples d'Emmaüs nous réserve une petite surprise sur les différents personnages.
Le lundi prochain, nous nous mettrons à table.
Je suis toujours avec vous, Ste Radegonde et Ste Bernadette dans mes eucharisties.
Bon courage pour le confinement.
UNION DE PRIERE ET D'ESPERANCE.
P. Théo.