Rédigé par P. Pascal Desbois et publié depuis
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L’évangile du Jeudi Saint ne nous propose pas le récit de l’institution de l’Eucharistie. Celui-ci nous est rapporté par la première lettre de saint Paul aux Corinthiens (1 Co 11, 23-26). L’Évangile de Jean (Jn 13, 1-15) nous montre Jésus entouré de ses disciples au moment essentiel et décisif pour l’annonce de la bonne nouvelle au monde. St Jean nous fait entrer dans l’intimité du groupe des apôtres, des siens comme dit le texte :
Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout (Jn 13, 1). Trois années de formations pour ce petit groupe, pour qu’il puisse transmettre la foi qui les habite désormais. C’est beaucoup et peu à la fois, mais Dieu achèvera en eux ce qu’il a commencé ! Au fil des évangiles, on voit jésus enseigner en parabole, édifier par ses miracles et même corriger ses disciples. Jésus vit au milieu de ce petit groupe qu’il s’est choisi... pour qu’il le voie. Il leur enseigne à aimer en les aimant dit St Jean (ayant aimé les siens) A la cène c’est leur dernier moment d’intimité avant la passion. Ce qui a été vécu par les disciples de Jésus est unique dans l’histoire du Salut. C’est l’expérience de l’amour de Dieu vécu humainement au plus intime. St Jean le précise dans sa 1ère lettre : ce que nous avons contemplé de nos yeux, et que nos mains ont touché, c’est le Verbe, la Parole de la Vie, car la Vie s'est manifestée : nous l'avons vue, nous en rendons témoignage (1Jn 1, 1).
En vivant avec Jésus et en le voyant vivre, ils sont devenus purs, capable à présent d’annoncer au monde la bonne nouvelle du royaume ! Mais cela à condition d’accepter de se laisser transformer, vivifier sans cesse sous le regard du Christ. L’enseignement de Jésus ne s’impose pas aux hommes, il ne contraint pas leur liberté mais demande de leur part un engagement. La présence de Judas dans le groupe des apôtres certifie que jésus laisse ses disciples entièrement libre de le suivre ou non. C’est la condition nécessaire à son enseignement ! Avec Jésus, nous n’avons pas à faire à un gourou ! Nous serons toujours libre de nous laisser purifier ou non, de nous laisser regarder ou non tels que nous sommes. La présence de Judas dans le groupe des apôtres montre en définitive la nature de l’enseignement de Jésus : Jésus apprend ses disciples à aimer en les aimant. Aimer c’est prendre des risques, aimer c’est tout donner, dira Ste Thérèse.
Si Jésus donne cet enseignement à un tout petit groupe, c’est pour que celui-ci le transmette au monde entier… Et à vue humaine : c’est vraiment prendre des risques. Pour cela il y a une ultime purification : ne pas garder pour soi cet amour reçu du maître et Seigneur pour vivre à la suite de celui qui n’a rien gardé pour lui. Aimer c’est tout donner ! Les trois années passées auprès de Jésus n’auraient servi à rien si l’enseignement du Christ n’avait pas été transmis au monde à la manière du Christ. Alors Jésus leur donne l’ultime enseignement, l’ultime purification : celui du lavement des pieds. Le lavement des pieds c’est le geste du serviteur : ce n’est que par cette attitude que l’enseignement du Christ peut se transmettre vraiment… Jésus enseigne une fois de plus par l’exemple en se faisant lui-même serviteur de ses propres disciples. Il est toujours l’initiateur !
Être serviteur nous fait découvrir notre être profond parce que nous sommes tous liés les uns aux autres, au service les uns des autres. Être serviteur nous apprend à nous connaître, nous éclaire, nous purifie. Mais attention : Il ne s’agit pas d’être bonne poire ! Il faut être au service du Bien Commun qui n’est autre que le Christ Lui-même. S’il n’y avait que le service cela ne suffirait pas pour transmettre la foi, il faut la charité, cet amour désintéressé donné par le Christ justement. Sans cela l’Eglise n’est plus qu’une super ONG incapable de donner un sens ultime à son action… C’est dans l’Eucharistie que nous recevons cet amour désintéressé dont nous avons besoin.
Dans l’Eucharistie, Jésus nous donne la nourriture spirituelle dont nous avons besoin. Il nous donne le sens ultime nécessaire à notre action et qui fait son Église. Autant le service est visible... concret, autant l’Eucharistie demeure cachée :
Mystère d’union effective à Dieu dans la foi en Jésus-Christ. Durant sa vie publique, le Christ s’est fait serviteur de ses disciples, dans l’Eucharistie il se fait serviteur pour tous les hommes ! L’aliment, c’est le serviteur par excellence, c’est ce qui se donne entièrement. Dans l’Eucharistie, le Christ est vraiment celui qui va jusqu’au bout.
Aimer c’est tout donner ! Il nous rend participant à son mystère d’abaissement... et participant à sa Vie. Ceci est mort corps ! (1Cor 11, 24)
A la fin de la messe, nous exposerons les espèces consacrées devant le tabernacle. Vous pourrez y venir pour rester un temps auprès du mystère Eucharistique, mystère de présence qui nourrit notre foi, qui nous transforme petit à petit et nous fait vivre à la suite de notre maître et Seigneur Jésus-Christ.
Amen
P. Pascal Desbois
Ex 12, 1-8.11-14 ; Ps 115 (116b), 12-13, 15-16ac, 17-18 ; 1 Co 11, 23-26 ; Jn 13, 1-15